top of page
Photo du rédacteurAgnès T

Méthodes naturelles et post-partum: David contre Goliath





Vous le voyez venir le sujet chaud-bouillant ? Ce sujet qui fait partir en vrille, parce qu'il touche à notre intimité, à notre corps, parce qu'il nous trouve vulnérables, fragiles, dans une période de fatigue, de remaniement, une période où nous devons tout réajuster. Notre famille s'agrandit, et le bouleversement est immense pour chacun.


Rentrons dans le vif du sujet, et dites-moi si vous vous reconnaissez. Vous êtes une jeune maman qui vient d'accoucher. Dans votre chambre de maternité, votre bébé tète avec appétit. Il est encore tout petit, fripé à souhait, et ses petits poings serrés vous rappellent le grand voyage qu'il a enduré il y a quelques heures, combatif, pour arriver parmi nous. Quant à vous, vous vous dites qu'il est bon que la chambre ne soit équipée que d'un petit miroir de salle de bain, sans quoi vous seriez presque obligée de vous confronter à votre reflet. Votre ventre désormais vide vous laisse un fond d'amertume, malgré la joie d'avoir enfin rencontré votre bébé. Vous planifiez votre sortie de la maternité. Papiers administratifs, examens d'usages, et là, LA question: "Madame, je vous mets quoi comme contraception ?"

Ce blanc qui suit la demande, on l'a toutes vécu. Ce moment de solitude, où on se sent si petite. Assumer ses choix, oui, mais pas là, pas sur ce lit de maternité, avec ce sang qui coule encore, ces poches sous les yeux, cette poitrine douloureuse et ces points qui tirent. Que répondre à cette question ?

"Rien. Ne me prescrivez rien."

"Je ne veux pas prendre de contraceptif."

"Avec mon mari, nous utilisons la régulation naturelle des naissances."

Franchement, on est tenté de murmurer un "Ce que vous voulez" tout bas et de jeter à la poubelle la fameuse ordonnance dès que la sage-femme sort.

Mais il faut se confronter à ces yeux de merlanfrit qui s'ouvrent grand lorsqu'on refuse la contraception. Il faut se confronter à "Vous êtes consciente qu'on va peut-être se revoir dans neuf mois alors ?", "Vous savez que vous pouvez ovuler n'importe quand à votre retour de couches ?"

Bien des fois, il m'est arrivé de hurler intérieurement: si vous saviez comme ça me fait suer de ne pas prendre de contraception ! Si vous saviez comme j'aimerai !


Pourtant, on se retrouve chez soi, cet épisode oublié (ou presque). Il faut reconnaître que l'union des corps n'est pas notre première préoccupation à quelques jours d'avoir accouché (je vous renvoie au sketch de la comédienne et humoriste Diane Segard, qui en parle extrêmement bien dans une de ses vidéos sur le sujet). Sans entrer dans les détails, il y a un temps pour tout. Le temps des retrouvailles sera plus tard. On accepte momentanément de vivre comme deux colocs, en période d'examens. On sait tous que les examens ne sont pas les périodes les plus festives... Pour les couples, c'est pareil. Le temps du désir reviendra.


Mais le temps passe, les choses se mettent petit à petit en place et le désir renaît. Parfois, c'est long. Parfois c'est chargé. Côté femme, on a peur. On se sent douloureuse. On sent qu'il y a un cap à passer. Un nouveau lâcher prise à vivre. Côté homme, on peut avoir peur aussi. Finalement, on se rend compte d'une chose: là, tout de suite, maintenant, nous ne sommes pas ouverts à la vie. Ce sera alors au tour du curé de faire les gros yeux, me direz-vous. Pourtant, non. Il y a un profond non-sens chez les couples qui parlent de l'ouverture à la vie comme de l'ouverture à l'arrivée d'un autre enfant dans la famille. L'ouverture à la vie, c'est aussi l'ouverture à notre (nos) enfant(s) qui sont déjà là. J'irai même plus loin: accueillir un autre bébé serait inconscient dans certains cas. (Je ne me fais pas moralisatrice, je parle d'un cas de figure parmi d'autres).


Que faire alors ? Car si je résume, nous avons devant nous un couple bouleversé d'une nouvelle naissance; une femme qui ne reconnaît pas son corps et qui se sent plus mère qu'épouse; une société qui la montre du doigt parce qu'elle ne prend pas de contraceptif et une Eglise qui lui demande de respecter son cycle. Grand moment de solitude.


Figurez-vous que je n'ai pas la réponse, car il n'y a pas de réponse toute faite. Chaque réponse est du sur-mesure, en fonction de chaque couple et de chaque naissance. L'Eglise recommande des choses pour le bien de ses enfants, mais avec une grande précaution. Aussi, nous sommes appelés à la maternité et paternité responsables. Cela signifie qu'il y a un certain nombre de critères à prendre en compte pour discerner où nous sommes, où nous nous situons dans le contexte qui est le nôtre. On ne peut pas dire à une jeune mère de famille qui se sent sous l'eau avec ses petits, tout ce qu'elle mène de front, qui cherche un équilibre: "pense à observer ton cycle, à noter toutes les informations, et surtout n'oublie pas que tu es épouse avant d'être mère". Vous le voyez arriver le pétage de câble ? Le sentiment d'injustice ? La difficulté d'avoir autant de responsabilités sur les épaules: les enfants, la fertilité, et parfois la maison, un travail, des âmes à faire grandir et des corps à soigner ?


Avec ça, on est bien. Pour le moment, je ne vois pas comment nous ne sommes pas ridicules, les cathos, à vouloir être parfaits sur tous les plans.


Et c'est là qu'elle arrive, ma comparaison. David contre Goliath. Goliath, c'est justement la perfection. Goliath c'est la sexualité réglée comme du papier à musique, la maison irréprochable, les enfants exemplaires, la vie de couple épanouie, le travail équilibré et équilibrant. Goliath, c'est la vie qui ne passe finalement pas. Ce qu'on veut, c'est aller au bout des choses. Oui, c'est dur. Oui, on voudrait s'unir l'un à l'autre, mais non, on ne voudrait pas d'enfant. C'est comme ça. Beaucoup le vivent avec une grossesse "surprise": un test de grossesse positif qui déclenche une crise de larmes.


Doit-on culpabiliser de ne pas vouloir ? De ne pas nous sentir prêts ? Non. En revanche, entourons-nous. Entourons-nous de moniteurs billings, d'instructeurs fertility care, qui nous aideront et nous épauleront dans cette quête difficile d'équilibre. Entourons-nous de prêtres qui écouteront nos plaintes, prendront en compte nos difficultés et nous aideront dans notre discernement.


J'aime ce que ce prêtre m'a dit en confession au sujet de la sexualité après une naissance: "Ce que vous demande l'Eglise est héroïque." Il se trouve que tout héros baisse les bras, parfois. Cela ne fait pas de lui un lâche. Il sera encore plus fort lorsqu'il aura traversé les épreuves qui sont les siennes.


Alors gardons courage. Soyons indulgents avec nous-mêmes, mais n'oublions pas notre soif d'absolu, de beauté. N'oublions pas que derrière tout cela, il y a l'amour juste d'un Dieu qui aime ses enfants avec tendresse. Mais... il les aimes tordus ! Faisons de notre mieux. Apprenons, aimons-nous. Nous sommes faits pour l'amour !










1件のコメント


Isa
7月15日

chère Agnès

Votre article est juste et écrit avec délicatesse. Merci ! Une toute petite remarque. Après la naissance de mon cinquième enfant, j'ai moi aussi éprouvé de la fatigue et considéré, avec mon mari, que nous ne pouvions plus nous ouvrir à la vie, à court terme. Mais lorsque nous avons ardemment souhaité un sixième enfant, il n'est pas venu...alors même que nous n'avons jamais recouru qu'à des méthodes naturelles. Quel regret aujourd'hui de ne pas avoir eu plus de confiance en l'avenir à l'époque et en notre capacité à surmonter les difficultés !

Isa

いいね!
bottom of page