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La saveur de nos fêtes


Les fêtes approchent. Pour beaucoup, elles signifient "préparatifs", "messe", "cadeaux", "valises", "trajets", "repas", "famille", "discussion". La joie est au rendez-vous, la créativité mène la danse, et on frétille d'impatience à l'idée de vivre ces moments magiques. Le sauveur va venir, en s'incarnant, avec humilité. Le bonheur qui en découle est palpable et c'est tant mieux.


Mais nombreux sommes-nous à compléter cette liste: préparatifs tendus, cadeaux qui sont source de jalousie, d'incompréhension ou de malaise (mais que vais-je offrir à ce cousin éloigné que j'ai pioché et à qui j'ai dû parler deux fois dans ma vie ?), trajets interminables, logistique inconfortable, horaires de messe variables (Géraldine veut y aller à 18h car après c'est trop tard pour les enfants, mais Gudulfe est intransigeant sur le bon 23h30, la vraie messe de minuit...), repas beaucoup trop lourds et trop longs, famille dont les limites, les défauts et les failles nous sautent aux yeux, discussions qui ressemblent plus à des débats, et traditions sans queue ni tête que les pièces rapportées de la famille remettent soudainement en question (on dirait que ça leur fait plaisir: "moi je préfère ouvrir les cadeaux le 25 au matin, pas vous ?" "Mais non on n'a jamais fait comme ça" !)

QUI aura le dernier mot ?


Peut-être pouvons nous réfléchir de cette manière, et cela dans beaucoup d'autres domaines:

1) Dieu; 2) Moi;

3) Mon couple;

4) Les autres;


Dieu a le premier et le dernier mot. Cette fête, c'est pour lui. Elle n'aurait pas lieu s'il n'était pas là. Remettons les choses à leur place: Noël, c'est un enfant dans une crèche. Une belle messe, et c'est tout. Tout le reste est accessoire. Cela ne signifie pas que la fête ne doit pas être belle, non. Mais gardons à l'esprit que le choix de la viande, de la bûche, ou le fait de s'offrir des cadeaux sont des "plus" par rapport à la fête de la Nativité, qui est à elle seule un cadeau. En ayant cela en tête, on est un peu moins frustré de ce qui peut se passer ou ne pas se passer par ailleurs.


Moi. Qu'est-ce que je veux vivre ? Comment est-ce que je veux vivre cette fête ? Quels moyens je me donne alors ? Si, pour moi, c'est important d'avoir du temps pour prier, pour aller à la messe, alors comment j'aménage ce temps ? Si je tiens, cette année, à me faire le cadeau d'aller à la messe tard dans la nuit, comment est-ce que je discerne ce désir ? Oui, la famille est importante, mais elle n'est importante que par la valeur des membres qui la composent. En me prenant en considération, je m'autorise à m'écouter dans un premier temps. Cela ne veut pas dire que tous mes désirs seront satisfaits, mais que j'aurais pris le temps de les poser. Je garde à l'esprit que je suis libre.


En couple, même exercice. Posez-vous, un soir de semaine, et demandez-vous: que veux-tu vivre ? Comment veux-tu vivre ce temps de fête ? Besoin d'intériorité ? Besoin de moments conviviaux ? Quels sont tes besoins ? En ayant connaissance des besoins de l'autre, vous serez plus alerte, plus à même de comprendre comment il vit les choses, plus en mesure de lui offrir la possibilité de répondre à son besoin, plus attentif à ce qu'il se passe...


Je suis frappée de voir à quel point Noël est un moment qui peut générer de la rancoeur, de la frustration, de la colère ou de la jalousie. Je ne suis pas non plus adepte à tout prix du "Sans alcool, la fête est plus folle", fameuse phrase entendue trop souvent, comme si l'opulence de cette fête était nocive, mauvaise. Non, elle est bonne.


Qu'est-ce que la fête ?


La fête, ce n'est pas une tradition.

La fête, ce n'est pas une orgie.

La fête, ce n'est pas le bon déroulé, sans éclats, d'un évènement prévu depuis des mois.


La fête, c'est dans le coeur.

Vous pourrez organiser la plus belle des fêtes, mettre les petits plats dans les grands, dans la pléthore de mets délicieux et appétissants, vous casser en mille pour réussir mieux que jamais ce foie gras dont la recette se transmet de génération en génération depuis que les oies sont sur terre, si vos proches sont tristes ou abattus, si les repas virent au cauchemar pour cause d'orgueil mal placé, cela ressemblera plus à un rassemblement de bagnards dans la cour d'une prison qu'à une fête.

La fête, c'est quand les traditions sont au service de l'être humain, et pas l'inverse. Si, pour x ou y raisons, vous devez renoncer à faire une dinde aux marrons cette année (Gwendoline est allergique à la volaille), vous n'allez pas trahir qui que ce soit, et non, Grand-mère Joséphine ne va pas se retourner dans sa tombe parce que ce sera un gigot d'agneau à la place.


Une fête réussie, c'est un lieu où chacun possède sa place. C'est un lieu où, au delà de pouvoir ou non s'exprimer, on s'écoute (on écoute les autres et on s'écoute soi), dans l'esprit biblique: "Ah qu'il est doux pour des frères de demeurer ensemble !" (Psaume 133). Et là, peu importe que Jean-Michel soit vegan et que Charline ne jure que par les emballages cadeaux zéro déchet, que les enfants d'Enguerrand n'aillent qu'à la messe en rite extraordinaire ou que ceux de Justine n'aillent même pas à la messe. Les différences sont là, et sont-elles à tolérer ?


C'est la dernière question que je vous pose. Pendant ces vacances, allez-vous serrer les dents pour supporter la famille de votre conjoint ou la vôtre ? Allez-vous "tolérer" les choix de ceux qui seront sous le même toit que vous ?

Irais-je trop loin si je disais qu'il nous est demandé plus ? Non pas de cautionner ou de rejoindre, mais simplement d'accueillir et d'aimer. Aimer Charline, même si vous préférez le bon vieux papier cadeau qu'on jette à la poubelle après que les enfants aient fait les fous dedans; aimer Jean-Michel, son quinoa, et ses chocolats au lait végétal; aimer Enguerrand et ses enfants, Justine et les siens, sans les juger.

La famille, c'est le lieu du non-choix. On ne choisit pas sa famille. C'est presque un accident, au sens philosophique du terme. On choisit nos amis, il est donc plus facile de les aimer et de passer du temps avec eux.


Sachons aimer. Faisons l'expérience du vrai amour, de cet amour sans limites. Comment aimer sans limites ? Ce n'est pas humain. On aime sans limites lorsqu'on puise l'amour à sa source même: le Christ.


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