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Faut-il souffrir pour être belle ?

Quelle femme n’a pas entendu dans sa vie cette fameuse expression, « il faut souffrir pour être belle ! » à un moment où elle avait (malheur à elle !) osé se plaindre de ses talons de 15 centimètres qui lui faisaient mal aux pieds, ou bien au moment où elle avait laissé s’échapper de ses lèvres un court gémissement de douleur dû à une épilation un peu trop brutale du maillot ? Les femmes passent beaucoup de temps à se faire belles, dépensent une somme non négligeable pour cela, et acceptent parfois des désagréments plus ou moins gênants, tout cela pour, finalement, continuer de se trouver laide ou tout juste « passable ». Que se passe-t-il donc dans notre société ? Cette façon de raisonner et de faire est-elle uniquement le résultat d’un patriarcat oppresseur et des diktats des désirs masculins, comme nous le matraquent les féministes aujourd’hui ? Une femme peut-elle chercher à être belle, choisir de souffrir pour cela, ou est-ce une quête superficielle et inutile ? Explorons ensemble ce vaste sujet qui donne lieu à tant de débats.


Tout d’abord, qu’est-ce que souffrir ? C’est supporter quelque chose de pénible ou de désagréable. La souffrance en elle-même n’est pas toujours mauvaise : elle peut nous permettre de nous dépasser, de surmonter nos peurs, d’accepter certains désagréments pour atteindre un objectif plus noble. Non, ce n’est pas du masochisme ! En tant que catholiques d’ailleurs, nous avons un rapport tout particulier à la souffrance et au sacrifice, et nous savons bien qu’il faut parfois supporter des choses désagréables pour obtenir un plus grand bien, pour nous ou pour d’autres. Sans aller si loin, et en nous recentrant sur la beauté féminine, la souffrance peut prendre différents visages : douleur physique due à l’épilation, ou douleur psychologique de ne jamais se sentir à la hauteur, surtout lorsque l’on se compare aux autres ou que le seul modèle valable promu par les magazines et les réseaux sociaux, est très éloigné de la réalité. On peut aussi parler de souffrance lorsque certaines femmes se laissent presque mourir de faim, pour perdre toujours plus de poids. Ou alors pour celles qui dépensent presque tout ce qu’elles gagnent en chirurgie esthétique ou autres soins anti-vieillesse. Le temps passé à se transformer presque complètement (couleur, permanente, manucure, maquillage) ou à essayer de se faire toujours plus belle, peut aussi être vécu comme une contrainte, une pression, qui nous pousse à aller toujours plus loin dans notre quête de la beauté.


Au fait, qu’est-ce que la beauté ? C’est ce qui nous fait éprouver une émotion esthétique et qui plaît à l’œil. C’est également ce qui fait naître un sentiment d'admiration ou de satisfaction (opposé à mauvais, médiocre). Le beau est important, car le beau nous élève. J’en parle dans cet article : « la beauté sauvera le monde » (Dostoïevski). Le beau élève notre âme et celle des autres, et nous rapproche de Dieu. Comme le disait Saint Alphonse de Liguori, “lorsque nous voyons quelque chose de beau, un beau jardin ou une belle fleur, cela nous fait penser que nous voyons un rayon de l’infinie beauté de Dieu qui a donné vie à cette chose”. La femme est, en quelque sorte, l’ambassadrice de la beauté. Mais celle-ci ne doit pas être uniquement extérieure : c’est le bien que nous faisons, nos vertus, nos dons reçus de Dieu que nous devons cultiver et faire rayonner autour de nous. C’est un sourire qui illuminera notre visage, une bonne action qui réchauffera le cœur de quelqu’un, une parole de vérité qui guidera une âme vers Dieu. Tâchons de nous rappeler avec Édith Stein, que “le monde n’a pas besoin de ce que les femmes ont, mais de ce que les femmes sont”, et que nous sommes plus que notre apparence. C’est tout un cheminement intérieur à faire, et je vous invite à lire ce témoignage d’une ancienne mannequin américaine, qui a justement compris l’importance d’une beauté véritable et complète.


Aujourd’hui, la révolte gronde. Pourquoi les femmes devraient-elles souffrir pour être belles ou plutôt pour correspondre à certains critères de beauté complètement culturels et arbitraires ? Beaucoup de féministes revendiquent par exemple le droit de ne pas s’épiler. Bien entendu, ce n’est pas une approbation légale qu’elles cherchent, étant donné qu’aucune loi ne force les femmes à s’épiler. Mais elles veulent changer les regards sur les poils féminins et en finir avec les diktats culturels et masculins qui , selon elles, les forceraient à s’épiler. Mais l’épilation n’est-elle pas une sorte d’initiation à la féminité ? C’est, en quelque sorte, le passage rituel que vit toute femme au moment de sa puberté, et qui signe un peu son entrée dans la vie d’adulte. Certes, l’épilation est aussi un choix de beauté qui est rattaché à une culture. Mais on ne peut nier que l’être humain soit un être social, qu’il fasse partie d’un groupe, et qu’il ait besoin de ressembler à ce groupe et de suivre ses habitudes, pour sentir qu’il en fait partie. De plus, beaucoup de femmes associent une peau épilée et lisse à une peau de bébé, une peau de jeunesse. Alors que les poils seront davantage un signe de virilité, et presque de bestialité j’allais dire, en opposition à la douceur et à la sensualité féminines. Certaines diront que cette vision des choses est le résultat de la domination masculine qui sévit depuis des siècles, mais je crois qu’il faut aussi savoir analyser ces comportements et ces choix en toute objectivité, selon les préférences et les différences de chaque sexe. D’ailleurs, ce sont souvent les femmes qui ne tolèrent pas le moindre petit bout de poil qui repousse (et qui ne se voit même pas à l’œil nu), alors que les hommes ne sont généralement pas gênés par cela.


Que retenir de ces réflexions sur la beauté et la souffrance ? Tout d’abord, qu’il s’agit de ne pas tomber dans les extrêmes. Je crois qu’il est tout aussi mauvais de passer trop de temps et de dépenser trop d’argent à se déguiser en quelqu’un d’autre ou à camoufler le moindre petit défaut, que de se négliger, de promouvoir la laideur ou de manquer d’hygiène. Il est également préjudiciable de faire de tout cela des objets de revendications, de vengeance contre les hommes ou de victimisation des femmes. Si l’on fait le choix de ne pas s’épiler, pourquoi avoir besoin de le crier sur tous les toits, de l’exposer sur les réseaux sociaux et d’en faire un objet de combat ? Il ne faut pas oublier que les femmes subissent, certes, une certaine pression des magazines, des publicités, et de tous les standards de beauté qu’on leur propose à l’heure actuelle. Mais, d’un autre côté, elles se mettent aussi beaucoup de pression à elles-mêmes, car elles attachent énormément d’importance au regard des autres, et ont, au fond d’elles-mêmes, ce grand désir de plaire qui les pousse sans cesse à se juger avec sévérité, et à être intransigeantes avec elles-mêmes. À tel point qu’elles sont parfois prêtes à tout pour ne pas paraître leur âge, quitte à se tartiner le visage chaque matin de perturbateurs endocriniens, pour accepter leur image dans le miroir. S’abîmer la santé ou refuser de s’accepter telle que l’on est, avec des points forts et ses petits défauts, c’est là qu’est le vrai mal-être auquel nous devrions réfléchir, plutôt que de chercher à exposer nos poils partout.


Femmes, vous êtes belles, chacune à votre manière. Ayez confiance en vous, et, surtout, oubliez de temps en temps ce miroir qui vous joue tant de tours… La beauté physique est importante, pour vous, pour les autres, et même pour Dieu, c’est une évidence. Mais elle n’a de sens que si elle est le rayonnement de notre beauté intérieure, la manifestation de notre bonté et de l’élégance de notre cœur. Comme le disait Leah Darrow, cette ancienne mannequin américaine dont je vous parlais plus haut, “Une vie de beauté est une vie d’intégrité et de sainteté. Nous ne pouvons pas oublier notre relation avec Dieu. Si nous osons nous appeler “chrétiens”, alors chaque aspect de notre vie devrait être le reflet de cette vérité. À travers notre façon de nous habiller, de parler, et nos amitiés. Dans notre capacité à montrer de la gratitude et à être généreuses ; et ce, même dans les moments d’intense souffrance. Si nous sommes prêtes à regarder avec les yeux de Dieu, alors nous trouverons la beauté là où nous nous y attendons le moins.

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